Réflexions sur la haine dans les sociétés contemporaines
Marianne Celka, Eric Gondard, Matthijs Gardenier, Bertrand Vidal
Résumé
« [Le mécanisme de la haine] a ses racines dans cette tendance ancienne de l’être humain à la méchanceté, à l’agressivité, à la destruction et donc à la cruauté. Un groupe, pour réaliser son unité interne menacée de voler en éclats, ne peut rien faire de mieux que projeter ses propres tensions vers un autre groupe, si possible plus faible, qui est l’objet de sentiments hostiles », Riccardo Calimani, « La haine des juifs : réflexions et réponses », Le préjugé antijuif, (2009 : 313-338).
Illustration : Rufino Tamayo, Animals, 1941. MoMA.
Sommaire du numéro
La haine à l'ère de la politique de la nostalgie : réaction et résistance culturelle
Daniela PomaricoCet article explore l’usage de la nostalgie dans les discours populistes contemporains, en analysant comment elle se transforme en un puissant outil de légitimation des politiques identitaires et de rejet de l’altérité. En articulant les théories de Bauman sur la modernité liquide et la notion de « rétrotopie » avec les concepts de nostalgie restauratrice de Boym, le texte examine le lien entre l’idéalisme nostalgique et les pratiques de différenciation culturelle, sociale et raciale dans les discours de droite. Les discours de...
Lire la suiteLa haine, pour quoi faire ?
Elisa RéatoCet article dégage les traits généraux de l’approche sartrienne de la haine, pour comprendre comment la question de la haine dans les sociétés contemporaines engage un positionnement politique et une situation d’énonciation spécifiques. Ce faisant, nous verrons que nous ne sommes pas condamnés à cette passion.
Lire la suiteLa violence dans les fictions de la culture populaire adolescente : une haine de soi ?
Julien CueilleDans les productions culturelles à large public à destination des adolescent-e-s (mangas, sagas, séries ou jeux vidéo) l’imaginaire violent semble omniprésent, mais ne se réduit pas à une simple agressivité pulsionnelle. La violence n’est pas nécessairement l’indice d’un affect de haine, ni une incitation à la haine. Dans les entretiens menés, les adolescents verbalisent fréquemment leurs angoisses, le manque de confiance en eux-mêmes, ainsi que leur intérêt pour les personnages ambivalents, porteurs de fêlures secrètes, voire d’une haine de soi....
Lire la suiteLa sorcière occidentale comme mécanisme de défense face à la misogynie
Nelly RoussetAu vingt-et-unième siècle, en occident, dans une société prétendument rationnelle, des femmes s’identifient pleinement à la figure de la sorcière. Que cela soit discret, retranché aux confins de leur vie privée ou revendiqué haut et fort, plusieurs facteurs permettent d’expliquer le besoin d’identification à une telle figure, notamment, le fait qu’elle répond à une misogynie perçue. En effet, l’histoire de la sorcière, dans l’imaginaire collectif, relève tout d’abord d’une chasse misogyne par des hommes religieux contre des femmes puissantes à...
Lire la suiteLa haine du « rouge » et le terrorisme d’État en Colombie : l’alibi de la lutte contre l’ennemi intérieur durant le XXe siècle
Sebastián Acevedo OjedaDepuis les années 1930, la faillite du régime oligarchique, hérité du XIXe siècle, aura provoqué une période de crise et de grandes crispations sociales et politiques en Colombie, entre des forces qui prônent le changement social et politique et des secteurs qui défendent l’élitisme traditionnel. De cet affrontement national est née une fracture qui va créer un fossé infranchissable, sans possibilité de dépassement pacifique, plongeant le pays dans une spirale de violence. C’est dans ce contexte que les élites politiques...
Lire la suiteLa haine en tant que passion sociale : entre pulsion de mort et pulsion de vie sociale
Maxime PiccoloLa haine, tout comme son sentiment opposé l’amour, fait partie de la catégorie des sentiments passionnés. Ces sentiments d’une grande intensité se posent sur les gens et les choses. Si l’amour et la haine sont deux sentiments dits primaires (Honneth, 1992), ils sont au cœur des interactions entre les Hommes. Amour et haine suggèrent d’un côté l’attirance avec Eros, la pulsion de vie et de l’autre, la répulsion avec Thanatos, la pulsion de mort. L’amour érige et sédimente le lien...
Lire la suiteQuand l’émotion et la haine séparent partisans de l’équitation et ceux du bien-être animal
Patrice Regnier, Stéphane HeasLes pratiques et les relations anthropo-équines, relevant du corps et du sensible, et à ce titre, ayant été directement concernées par l’évolution des institutions, des mœurs et des affects, sont aujourd’hui perçues par une partie de la population comme une forme de domination de l’humain sur l’équin. Les partisans (pro-équins) et les opposants de l’équitation (proBEA) s’engagent dans des affrontements parfois violents, en particulier sur les réseaux sociaux. Cet article propose de présenter les éléments qui composent la situation actuelle...
Lire la suiteVaria/ Souk Chaouachine : cadre d’une mémoire
Dhouha Wiem MbazaaL’article explore les modalités par lesquelles le Souk Chaouachine de Tunis, un site emblématique de l’héritage arabo-andalou est non seulement un témoin de l'histoire et de l'identité collective tunisoise, mais aussi un espace dynamique de réinvention sociale de la mémoire collective qui lui est rattachée. À travers une approche multidisciplinaire qui mobilise la sociologie, l’anthropologie, l’ethnologie et l’urbanisme, ce travail vise à analyser comment la conservation patrimoniale et les initiatives de revitalisation participent à la construction d'une identité urbaine à...
Lire la suiteVaria / En regardant la télévision avec Michel Houellebecq
Denis FleurdorgeSimone Weil écrivait qu’un « être humain a une racine par sa participation réelle, active et naturelle à l’existence d'une collectivité qui conserve vivants certains trésors du passé et certains pressentiments d’avenir ». Le journal du 13 heures de Jean-Pierre Pernault s’offre au regard du sociologue comme une ligne qui se déploie contre les contradictions faciles, au profit d’un localisme universalisant et d’une nostalgie projetée vers l’avenir. (Ces quelques lignes sont proposées comme résumé par le comité de lecture ndlr).
Lire la suiteRecension/ Les migrants et nous. Comprendre Babel de Michel AGIER
Fatima Zahra Aït SalemCe livre se présente comme un plaidoyer pour la cause des migrants. Se positionnant en observateur des sociétés qui "accueillent", Agier, l'anthropologue, s'engage dans une entreprise de relecture critique des concepts de "migrant", "réfugié" et "travailleur immigré". Son analyse scientifique rigoureuse est accompagnée d'une déconstruction du regard que les "établis/ nous" portent sur « eux/ les migrants ».
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