N°9 / Utopies, dystopies et uchronies

De l'humain au posthumain : analyse d’une utopie controversée

Pierre Bourgois

Résumé

Si, d’une manière générale, on considère l’utopie comme « un lieu fictif, créé par un auteur ou un groupe de personnes, dans lequel il est possible d’imaginer une société idéale, et de dénoncer par-là les travers de son temps », le mouvement transhumaniste s’y assimile alors parfaitement. Les utopistes du posthumain voient ainsi dans la technique un moyen de rompre directement avec le déterminisme qui englobe depuis toujours l’humanité et empêche sa progression.

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Par Pierre Bourgois, Docteur en Science Politique, ATER, Institut de Recherche Montesquieux, Université de Bordeaux.

Ces dernières années ont vu « fleurir » une multitude d’utopies, dont certaines alimentent et ce, de manière significative, les débats contemporains. En ce sens, l’utopie semble même être devenue, pour certains, une idée « à la mode »[1]. Parmi ces « porteurs » d’utopie, le mouvement transhumaniste, dont l’un des principaux objectifs demeure, à court ou moyen terme, celui de dépasser les limites de la nature humaine et donc, d’une manière générale, de propulser les sociétés humaines à l’ère de la posthumanité. Les utopistes du posthumain partagent ainsi « la conviction que les sciences et les techniques peuvent constituer le tremplin qui permettra de dépasser ce que les hommes ont figé en réalités intangibles, malgré les pouvoirs qu’ils se sont arrogés sur la nature »[2].

À cet égard, cette utopie posthumaine semble être portée par les nombreux progrès technologiques à l’œuvre ces dernières années, notamment dans le champ des NBIC[3], permettant, de fait, le développement des trois principales « prophéties transhumanistes »[4], à savoir la fin de la naissance, la fin de la maladie et la fin de la mort[5]. En ce sens, un nombre croissant d’acteurs (chercheurs, entreprises, think tanks…) participent aujourd’hui à la consolidation de ce mouvement, prétendant ainsi que la technique permettra à l’homme de combler la plupart, si ce n’est l’ensemble, de ses lacunes biologiques, ce au profit d’une « perfection post-humaine ».

Toutefois, il est évident que de telles affirmations représentent des enjeux considérables et cristallisent fortement les réflexions scientifiques contemporaines. Nombreux sont effectivement ceux qui, dans les champs disciplinaires les plus variés, s’opposent à ces utopies posthumaines célébrant, à tout-va, l’avènement prochain d’un homme nouveau, débarrassé de ses faiblesses. D’une manière générale, ces critiques dénoncent ainsi les espoirs du mouvement transhumaniste qui, alimentés par les progrès technologiques en cours, pourraient mettre un terme à l’humanité en tant que telle, au profit d’un monde nouveau, celui du posthumain.

Comment peut-on analyser aujourd’hui l’émergence de ces nouvelles prophéties posthumaines ? Ce travail tentera, tout d’abord, de mettre clairement en avant le lien entre utopie et posthumanisme. En ce sens, nous verrons que les attentes du courant transhumaniste constituent un parfait exemple d’utopie contemporaine. Il conviendra ensuite de présenter plus en détails les forces qui sous-tendent ces utopies posthumaines. Portés par des acteurs de plus en plus nombreux et par des progrès technologiques constants, les projets transhumanistes semblent ainsi s’éloigner de plus en plus du champ de la science-fiction, certaines idées relevant désormais clairement du domaine du possible. Enfin, nous tenterons de confronter ces utopies contemporaines à leurs principaux détracteurs, ceux qu’on appelle les bioconservateurs et qui, d’une manière générale, voient dans ces progrès technologiques mis en avant par les transhumanistes, une atteinte au caractère immuable de la nature humaine.

Utopie et posthumanisme

Tout d’abord, il convient de revenir sur les termes de transhumanisme et de posthumanisme. Si par posthumanisme nous entendons, comme on l’a vu précédemment, l’idée générale d’un dépassement, par la technologie, de l’homo sapiens et des caractéristiques qui définissent aujourd’hui l’humain, au profit d’une espèce nouvelle, à savoir le posthumain[6], qu’en est-il du transhumanisme ?

Le transhumanisme, terme utilisé pour la première fois par Julian Huxley[7] mais véritablement employé dans son sens actuel au cours des années 1980 par Fereidoun M. Esfandiary (rebaptisé FM-2030)[8], est défini, par ses membres, comme « une manière de penser l’avenir fondée sur la prémisse que l’espèce humaine dans sa forme actuelle ne représente pas la fin de notre développement mais une phase relativement précoce »[9]. Il se focalise ainsi sur l’amélioration des capacités physiques et mentales de l’être humain et vise donc, par conséquent, la transition de l’espèce humaine à un stade postérieur d’évolution où les faiblesses biologiques actuelles de l’homme auront disparu.

En cela, il se rapproche inéluctablement du posthumanisme. Pour le mouvement transhumaniste, il s’agit effectivement, « de soustraire l’être humain à toute condition biologique, de le “libérer de la biologie” elle-même. C’est cet au-delà de la biologie et de ses pesanteurs que symbolise notamment l’idée de “posthumain”, cet être “plus qu’humain” qu’appellent de leurs vœux les transhumanistes »[10]. En ce sens, le transhumanisme représente bien l’idée d’une transition entre l’humain et le posthumain : il vise « à exploiter toutes les ressources pour atteindre un état posthumain, voire postbiologique »[11].

Ainsi, bien qu’il existe des nuances à l’association des deux termes[12], on peut dès lors les regrouper, d’une manière générale, concernant leurs vues principales :

« Posthumanisme et transhumanisme : les deux courants se rejoignent et se confondent. Selon eux, s’il y a eu quelque chose comme une préhumanité avant l’homo sapiens, il est maintenant temps d’imaginer la prochaine étape, “après l’homo sapiens”, la posthumanité, et d’accélérer son avènement, puisque ce sera nécessairement un stade “supérieur” »[13].

Par ces deux termes nous entendons donc l'idée générale selon laquelle la science et la technologie vont permettre d'aboutir à un avenir différent et plus souhaitable poru l'humanité. Au vu de ce constat, on considère donc généralement le posthumanisme comme une véritable utopie. 

Le terme d’« utopie » apparaît pour la première fois sous la plume de Thomas More. La publication de son célèbre Utopia en 1516 introduit effectivement « dans le vocabulaire ordinaire un mot inusable – du moins toujours utilisé – et controversé, car polysémique »[14]. Thomas More posait donc déjà les fondations d’une notion complexe et discutée, à tel point de donner « l’impression que le mot “utopie”, depuis cinq siècles, possède, telle une médaille, deux faces : l’une positive – le projet d’une nouvelle société plus juste, plus fraternelle, plus généreuse et libératrice – et l’autre négative – un projet contraignant, totalitaire, irréfléchi, inconséquent, peu sérieux »[15].

Si, d’une manière générale, on considère l’utopie comme « un lieu fictif, créé par un auteur ou un groupe de personnes, dans lequel il est possible d’imaginer une société idéale, et de dénoncer par-là les travers de son temps »[16], le mouvement transhumaniste s’y assimile alors parfaitement[17]. Les utopistes du posthumain voient ainsi dans la technique un moyen de rompre directement avec le déterminisme qui englobe depuis toujours l’humanité et empêche sa progression :

« Le message des utopies posthumaines est simple : nous avons aujourd’hui les moyens scientifiques et techniques d’accomplir l’humanité, c’est-à-dire de supprimer toutes les imperfections qui lui barrent l’accès au bonheur. C’est le message de la plupart des transhumanistes […] qui se reconnaissent sous le label H+. L’utopie est bien présente en tant que telle, dans la perspective d’un bonheur qui mettra un terme aux errements de l’histoire »[18].

De fait, on retrouve initialement, à travers ces utopies, « une lassitude d’être ce qu’on est, une manifeste fatigue d’être soi, une désaffection pour les significations qui exigeraient qu’on veuille s’incarner dans l’histoire, qu’on s’implique dans les expériences qui façonnent l’individualité »[19]. Günther Anders évoquait déjà, en 1956, ce qu’il appelait « la honte prométhéenne », c'est-à-dire « la honte qui s’empare de l’homme devant l’humiliante qualité des choses qu’il a lui-même fabriquées »[20]. Ici, c’est donc le rapport de l’homme à lui-même qui est en cause : « Le transhumanisme n’annonce pas autre chose que l’atteinte prochaine, par la grâce des technologies, d’une vitesse de libération d’où émergera ce qui ne s’est jamais vu ni conçu. Ni réalité ni désir ne sont en jeu. Seulement l’abandon à ce qui surprendra un jour et gommera un passé de faiblesses trop humaines »[21].

Pour le mouvement transhumaniste, il s’agit donc « d’arracher ni plus ni moins l’homme à tout ancrage biologique en vue d’accéder à un nouveau stade de l’évolution »[22]. En ce sens, son projet remplit parfaitement sa fonction d’utopie. Par cette vocation à s’opposer au cadre définissant aujourd’hui l’humain, le mouvement fait la promotion d’une société idéale émancipée de toute forme de déterminisme biologique. L’objectif devient ainsi l’amélioration de l’homme et plus particulièrement, le passage tant attendu de l’humain au posthumain, celui-ci s’abandonnant totalement à une technique devenue, quant à elle, de plus en plus autonome[23].

De la science-fiction à la réalité ? Un mouvement en pleine progression

Mais de qui et de quoi parle-t-on concrètement ? Doit-on prendre au sérieux ces utopies posthumaines ? Les transhumanistes représentent-ils ainsi « simplement une secte d’illuminés technophiles issus de la classe moyenne, en mal d’ascension sociale et de sensations fortes ? »[24], ou une mouvance plus large implantée dans différents milieux scientifiques ? Sur ce sujet, Nicolas Le Dévédec observe ainsi :

« Si le transhumanisme demeure aujourd’hui relativement confidentiel, en Europe particulièrement, et le nombre de ses adeptes plutôt restreint, ce serait néanmoins une erreur d’en minimiser l’importance et l’intérêt sociologique. Son projet inspire de fait des projets politiques et technoscientifiques d’envergure […] L’utopie d’un humain augmenté par les technosciences portée par le mouvement trouve une importante résonance dans les sociétés occidentales contemporaines où l’aspiration à améliorer techniquement l’être humain et ses performances aussi bien physiques et intellectuelles qu’émotionnelles (human enhancement) gagne chaque jour en importance, traversant peu ou prou l’ensemble de la société »[25].

Apparu dans les années 1980 aux États-Unis, le mouvement semble aujourd’hui s’être particulièrement consolidé. Il compte désormais plusieurs organisations considérables gravitant, pour la plupart, autour de la World Transhumanist Association (WTA)[26], créée en 1998 par Nick Bostrom et David Pearce et rebaptisée en 2008 Humanity+. On y retrouve notamment les principales figures du mouvement, telles que Max More, fondateur (avec Tom Morrow) de l’Extropy institute, célèbre organisation transhumaniste d’inspiration libertarienne active jusqu’en 2006 où encore, à titre d’exemple, James Hughes, qui dirige l’Institute for Ethics and Emerging Technologies, think tank ayant notamment le contrôle, depuis 2004, du Journal of Evolution and Technology, anciennement Journal of Transhumanism[27]. Parmi les grands noms du courant transhumaniste[28], on pense également à Natasha Vita-More, Présidente d’Humanity+ et épouse de Max More, à l’ingénieur Kevin Warwick ou encore, à Eric Drexler, ingénieur dans les nanotechnologies et fondateur du Foresight Institute. Cependant, comme l’observe Rémi Sussan, « il ne faudrait pas identifier ce courant d’idées à une appartenance formelle à un groupe : dans le monde scientifique notamment, nombreux sont ceux qui partagent beaucoup des idées de ces groupes sans pour autant le clamer haut et fort »[29], tels que Marvin Minsky, Hans Moravec ou encore Ray Kurzweil, qui « appartiennent de toute évidence à cette mouvance, sans pour autant participer activement à une quelconque association militante »[30].

Think tanks, chercheurs, publications scientifiques… On semble donc loin du groupuscule esseulé. Le transhumanisme représente ainsi aujourd’hui, et ce quoi qu’on en dise, un mouvement de pensée à part entière et dispose d’une influence considérable, tissant des réseaux importants, notamment aux États-Unis. À cet égard, plusieurs grandes firmes se sont d’ores et déjà positionnées et investissent désormais à grande échelle dans plusieurs des projets transhumanistes. On pense bien entendu ici à Google qui, à titre d’exemple, a notamment recruté en 2012 l’icône du transhumanisme et le promoteur du concept de Singularité, à savoir Ray Kurzweil, auteur de plusieurs ouvrages sur le sujet[31] et adulé par les « fans » du mouvement. La firme américaine a notamment lancé en 2013 sa filiale Calico (California Live Company), dont l’objectif principal est de lutter contre le vieillissement et les maladies qui lui sont associées.

Outre ces différents acteurs, ce mouvement semble également s’appuyer sur des avancées technologiques considérables. Ainsi, si bon nombre d’espoirs transhumanistes relèvent encore aujourd’hui de simples fantasmes et trouvent davantage leur reflet dans le champ de la science-fiction, il serait toutefois illusoire de les repousser d’un simple revers de main en ne s’attardant que sur leur aspect fictif. En effet, plusieurs évolutions technologiques majeures se produisent d’ores et déjà dans les divers domaines scientifiques et suscitent de nombreux et vastes débats. Aujourd’hui, il est ainsi devenu de plus en plus difficile de distinguer médecine thérapeutique et médecine méliorative. Ainsi, ne serions-nous pas déjà, d’une certaine manière, des transhumains ?

Si la science-fiction semble avoir inspiré ce mouvement, l’essor du transhumanisme s’explique ainsi, en partie, par les nombreux progrès technologiques réalisés dans les domaines scientifiques les plus variés et qui risquent d’impacter durablement nos modes de vie. Déjà aujourd’hui, en matière d’avancées médicales, il est presque devenu banal d’évoquer des technologies comme les exosquelettes, cet équipement externe fixé au niveau du bassin ou des membres et qui permet d’accroître et de dépasser de manière significative les capacités physiques « naturelles » humaines[32]. Dans le même ordre d’idées, on peut également citer l’exemple des bras bioniques, des puces directement implantées dans le cerveau et permettant de contrôler plusieurs objets à distance, des rétines artificielles, du contrôle de certaines émotions via des médicaments[33]

Mais la frontière entre réparation et amélioration semble bien floue, plus particulièrement dans des sociétés où le culte de la perfection demeure constant. Ces avancées scientifiques entretiennent ainsi les nombreuses craintes quant à la perspective d’un « homme augmenté », tant mise en avant par les transhumanistes et qui repose notamment sur « un slogan : devenir plus forts, plus intelligents, plus heureux et vivre indéfiniment »[34]. Au premier rang des attentes du courant transhumaniste se trouve donc, ni plus ni moins, la victoire contre la mort elle-même ! Ce mouvement s’érigeant ainsi comme la solution aux faiblesses humaines, il n’est effectivement pas étonnant d’observer que la quête de perfection humaine des transhumanistes s’achève dans l’atteinte de l’immortalité. Jean-Michel Besnier observe ainsi :

« L’immortalité s’est banalisée. Elle a quitté le terrain de la religion dans laquelle elle figurait comme le mobile des tout premiers cultes et donc, si j’ose dire, l’aliment de base des croyants. Elle a débordé l’espace de la métaphysique où l’on s’obstine à en finir avec la finitude humaine, à force de systèmes visant à rendre raison de l’illusion du mal et du temps. Elle a acquis à présent la dignité d’un objet scientifique au sein des laboratoires qui entreprennent de comprendre les mécanismes du vieillissement afin de les contrôler, voire de les neutraliser »[35].

L’immortalité (ou plutôt la fin de la mort programmée)[36] devient ainsi l’un des thèmes de plus en plus populaires[37], si ce n’est la « marque de fabrique » du mouvement. On retrouve en permanence, chez les transhumanistes, l’idée que le vieillissement et la mort ne sont finalement que de « simples » faiblesses biologiques que la science peut résoudre. On pense ici tout particulièrement à Ray Kurzweil, Eric Drexler, Kevin Warwick ou encore à Aubrey de Grey et son Projet « SENS » (Strategies for Engineered Negligible Senescence). L’immortalité est ainsi « devenue chose banale, et l’on accueille avec de plus en plus de respect ceux qui font métier d’inciter les technosciences à lui donner crédibilité et acceptabilité, en l’occurrence : les mouvements transhumanistes »[38].

La technique doit (et peut) donc, selon eux, venir à bout de l’ensemble des faiblesses inhérentes à l’homme. La maladie, la vieillesse et la mort ne sont ainsi nullement des caractéristiques immuables, mais seulement des entraves à l’évolution et au perfectionnement de l’être humain[39]. Pour ces promoteurs du posthumain, il s’agit donc « de dépasser la nature humaine, ni plus ni moins. La science-fiction avait préparé le terrain, sur un plan littéraire. Il devient possible de lui accorder désormais le crédit philosophique qui légitimera les programmes techniques et scientifiques de l’avenir »[40].

Mais si le progrès technologique affecte la nature même de l’être humain, peut-on (et doit-on) toujours parler d’humanité ? En ce sens, ce qui fait l’homme n’est-il pas justement l’ensemble de ses faiblesses et vulnérabilités ? On touche ici au cœur même des critiques formulées à l’égard du transhumanisme, notamment par ceux que l’on appelle, d’une manière générale, les bioconservateurs.

Un mouvement fortement critiqué : les bioconservateurs

L’émergence et la diffusion d’un tel mouvement suscitent ainsi à la fois espoir et angoisse, entre les partisans d’une évolution de l’humain et ceux qui, au contraire, considèrent la nature humaine comme une valeur fondamentale et immuable. À cet égard, on oppose donc traditionnellement aux transhumanistes les bioconservateurs qui s’inquiètent, pour leur part, de cette évolution possible des frontières de l’humain. Ainsi, nombreux sont ceux qui, dans les champs disciplinaires les plus variés, s’opposent à ces utopies posthumaines qui célèbrent, à tout-va, l’avènement prochain d’un homme nouveau, débarrassé de ses faiblesses.

On pense particulièrement ici à Francis Fukuyama[41] qui, s’appuyant notamment sur la dystopie du meilleur des mondes[42], s’inquiète ouvertement de l’impact que pourrait avoir l’évolution des progrès biotechnologiques sur la nature humaine et donc sur les sociétés politiques contemporaines[43]. Celui qui fut membre du President’s Council on Bioethics[44] de 2001 à 2004 formule ainsi de nombreuses critiques à l’égard de cette révolution biotechnique. Outre ses inquiétudes concernant les sciences du cerveau, la neuropharmacologie (où la diffusion à grande échelle dans certains pays de la Ritaline et du Prozac nous rapproche notamment, à ses yeux, d’un être humain androgyne mais surtout du dernier homme de Nietzsche) et la prolongation de la vie, ses craintes se tournent également vers l’ingénierie génétique humaine[45] qui, selon lui, « soulève très directement la perspective d’une nouvelle sorte d’eugénisme, avec toutes les implications morales et historiques dont ce terme est chargé, l’objectif ultime étant la capacité à changer la nature humaine »[46]. Les craintes de Fukuyama reposent donc sur l’idée que les biotechnologies auraient désormais, dans un futur proche, la capacité d’influer directement sur la nature humaine, si ce n’est de la changer radicalement. Or, c’est cette nature humaine, avec ses caractéristiques positives et négatives, qui a fait, selon lui, le lit de l’histoire et qui a permis aux sociétés de s’acheminer, pour la plupart d’entre elles, vers le libéralisme politique et économique. En impactant la nature humaine, la recherche scientifique pourrait ainsi transformer directement le cours de l’histoire et l’ensemble de l’ordre politique et social des sociétés contemporaines. Fukuyama s’érige donc comme un farouche opposant aux transhumanistes qui, comme il l’observe, souhaitent tout simplement « libérer la race humaine de ses contraintes biologiques »[47].

Outre Fukuyama, nous pensons également, à titre d’exemples, à Jürgen Habermas[48], Michael Sandel[49], Bill McKibben[50] mais encore et surtout, à Leon Kass, « l’une des figures intellectuelles emblématique du courant “bioconservateur” »[51] et président, entre 2001 et 2005, du President’s Council on Bioethics[52]. Pour Leon Kass, il faut à tout prix préserver la nature humaine contre les avancées technologiques qui pourraient notamment menacer, à ses yeux, la dignité fondamentale de l’être humain[53]. Ces auteurs sont donc des figures importantes du courant bioconservateur et défendent, d’une manière générale, le caractère immuable de la nature humaine[54]. Selon eux, les avancées technologiques à l’œuvre ces dernières années menaceraient ainsi directement l’ordre social des sociétés humaines. Comme l’écrit Gilbert Hottois :

« Les bioconservateurs (tels Jonas, Habermas, Fukuyama, Kass, etc.) entretiennent deux certitudes angoissées qui fondent leurs interdits : selon la première, toute manipulation trans- ou post-humaine est dégradante pour l’être qui la subit, car elle lèse la valeur – la dignité – qui s’attache à tout être humain. Selon la seconde, l’avènement de transhumains supérieurs ou de posthumains étrangers met en danger la dignité des humains eux-mêmes qui seront traités comme des êtres inférieurs »[55]

Le développement des idées transhumanistes ne suscite donc pas que des admirateurs et s’accompagne de multiples et diverses critiques. En ce sens, la nature même du monde de demain dépendra en grande partie de l’« affrontement » entre les bioconservateurs et les transhumanistes ou, pour reprendre les termes de Dominique Lecourt, entre les « biocatastrophistes » et les « technoprophètes »[56]. Deux visions de l’homme et du monde s’affrontent donc présentement et l’issue demeure encore aujourd’hui incertaine, bien que les idées transhumanistes semblent être, indéniablement, en pleine progression[57]. Du moins, semblent-elles jouir de soutiens considérables et leur réception n’apparaît pour l’instant que très peu affectée par ces critiques. Ainsi, selon Jean-Michel Besnier écrit : « On ne soulignera jamais assez combien les discours “hype” tenus par les technoprophètes d’aujourd’hui nous ont habitués à atteindre l’impossible, qui aura raison bientôt de notre clairvoyance à l’égard de la démesure technologique »[58].

Conclusion

Bien qu’elles soient fortement critiquées, les idées véhiculant l’idée d’un posthumain gagnent aujourd’hui inéluctablement du terrain. Comme on a pu le voir précédemment, loin de constituer un groupuscule isolé, le mouvement transhumaniste semble ainsi se consolider, notamment de part sa forte institutionnalisation, mais également en s’appuyant sur les nombreuses avancées technologiques à l’œuvre aujourd’hui. À cet égard, certains considèrent que le transhumain est d’ores et déjà présent parmi nous et que nous venons donc d’entrer, « beaucoup plus tôt que prévu, dans la phase de fusion de la vie et de la technologie »[59] et que « dans la guerre pour ou contre la modification de l’homme, les transhumanistes ont gagné la bataille de l’expertise et de l’influence »[60].

Pendant longtemps, les idées transhumanistes ont été confinées dans le champ de la science-fiction. Celle-ci apparaît d’ailleurs encore aujourd’hui une source d’inspiration majeure des discours transhumanistes, qui mélangent constamment mythes et réalité, fantasmes et avancées technologiques probables. C’est donc « au carrefour de ces champs — science, technoscience et science-fiction — que logent le transhumanisme et le posthumanisme. Entre la réalité des découvertes dans les labos, les applications qu’on espère pouvoir en tirer et les autres projets qu’elles suscitent »[61].

Pour sa part, ce travail a cherché à mettre en perspective le posthumanisme à travers le prisme de l’utopie, dont l’une des caractéristiques essentielles est de proposer une société futuriste idéale en rupture avec le monde d’aujourd’hui. En ce sens, les utopies posthumaines accomplissent parfaitement « la fonction critique de toute utopie : percer à jour les folies du monde réel, derrière l’imaginaire ou les fantasmes qu’il produit, afin d’orienter le présent vers un avenir désirable »[62]. Comme on l’a vu précédemment, la prolifération des idées transhumanistes s’appuie sur une véritable dépréciation de l’homme, sur le dégoût, la honte « d’être ce qu’on est ». Jean-Michel Besnier observe ainsi que le désir d’immortalité des mouvements transhumanistes apparaît, de fait, comme « le masque d’une haine de la vie »[63]. Face à ce constat, l’avenir de ces utopies posthumaines semble donc indéniablement reposer sur la représentation que se font les hommes du monde actuel et, plus particulièrement, de celle qu’ils se font d’eux-mêmes. De ce critère dépend sans aucun doute la nature même de l’homme de demain.

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[2] BESNIER J.-M., Demain les posthumains : le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Paris, Fayard, coll. « Pluriel », 2012 (2009), pp. 47-48.

[3] NBIC désignant la convergence entre les nanotechnologies (N), les biotechnologies (B), les sciences de l’informatique (I) et les sciences cognitives (C). Voir ROCCO M. C. et BAINBRIDGE W. S. (Dir.), Converging Technologies for Improving Human Performance : Nanotechnology, Biotechnology, Information Technology and Cognitive Science, Arlington (Virginia), National Science Foundation, 2002.

Pour Jean-Michel Besnier, cette convergence offre ainsi « depuis le début du millénaire une marche supérieure à l’utopie d’une humanité accomplie grâce aux technosciences : elle alimente l’idée que nous serions sur la voie de préparer un au-delà de l’humain – un posthumain, une espèce inédite ». BESNIER J.-M., « L’utopie d’un posthumain », in Les utopies, Paris, CNRS Éditions, coll. « Les Essentiels d’Hermès », 2013, p. 141.

[4] BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 67.

[5] Ibidem.

[6] On peut souligner ici que le terme de posthumanisme est en réalité bien plus large et peut notamment regrouper, dans une conception plus classique, des critiques adressées aux conceptions de l’humanisme traditionnel. Nous n’aborderons pas ici ces distinctions et considérerons simplement le posthumanisme dans sa conception technoscientifique, à savoir l’idée selon laquelle la technique permettra d’atteindre un stade supérieur de l’évolution humaine, où l’homme se sera tellement éloigné de ses caractéristiques biologiques actuelles qu’il ne sera alors plus vraiment humain. Il adviendra donc un au-delà de l’humain, une ère nouvelle : la posthumanité.

[7] Le frère d’Aldous Huxley. Voir HUXLEY J., New Bottles for New Wine, Londres, Chatto & Windus, 1957.

[8] Voir notamment FM-2030, Are You a Transhuman ? Monitoring and Stimulating Your Personal Rate of Growth in a Rapidly Changing World, New York, Warner Books, 1989.

[9] BOSTROM N., « Transhumanism FAQ », site de Humanity+. [En ligne], http://humanityplus.org/philosophy/transhumanist-faq/, (consulté le 14 janvier 2016). Traduction de l’auteur.

[10] LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Montréal, Liber, 2015, p. 208. Nicolas Le Dévédec citant ainsi ici l’ouvrage More than Human de Naam Ramez : RAMEZ N., More than Human: Embracing the Promise of Biological Enhancement, New York, Broadway, 2005.

[11] SUSSAN R., Les utopies posthumaines. Contre-culture, cyberculture, culture du chaos, Sophia-Antipolis, Omniscience, 2005, p. 150.

[12] Pour une approche plus détaillée présentant et distinguant l’ensemble des termes associés au transhumanisme, voir notamment HOTTOIS G., MISSA J.-N., PERBAL L. (dir.), Encyclopédie du trans/posthumanisme. L’humain et ses préfixes, Paris, Vrin, 2015.

[13] ROBITAILLE A., Le nouvel homme nouveau. Voyage dans les utopies de la posthumanité, Montréal, Boréal, 2007, p. 12.

[14] PAQUOT T., Utopies et utopistes, Paris, La Découverte, coll. « Repères », 2007, p. 5.

[15] Idem, p. 9.

[16] Voir l’introduction de l’ouvrage l’Utopie réalisée par Quentin Deluermoz : DELUERMOZ Q., « Les utopies d’Elias. La longue durée et le possible », in L’utopie, Paris, La Découverte, 2014 (2009), p. 9.

[17] Comme l’écrit Jean-Michel Besnier, les utopies « posthumaines » sont ainsi « comme toutes les utopies : elles se construisent à partir d’un contexte historique qu’elles rejettent systématiquement. En l’occurrence, leur repoussoir, l’ancien monde avec lequel elles proposent la rupture, c’est le XXe siècle décrit comme une période ayant imposé un ordre mortifère et endigué tout ce qui promettait d’émerger. C’est l’ennui d’être ce qu’on est qu’il faut secouer, parce qu’il s’accommode de l’entropie qui mine l’histoire des hommes. Héritiers, sans toujours le savoir, du surréalisme, les utopistes du posthumain entendent faire prévaloir la cause de l’imaginaire et orchestrer systématiquement la subversion, en mobilisant les forces de la science et de la technologie ». BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 47.

[18] BESNIER J.-M., « L’utopie d’un posthumain », Op. Cit., p. 140-141.

[19] BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 71.

[20] Voir ANDERS G., L’obsolescence de l’homme. Sur l’âme à l’époque de la deuxième révolution industrielle, Paris, Éditions de l’Encyclopédie des Nuisances, 2002 (1956), p. 37.

Également cité par Jean-Michel Besnier. Voir BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 75.

[21] Idem., p. 77. Jean-Michel Besnier souligne ainsi que : « Décomplexées par rapport aux exigences de la mémoire, les utopies posthumaines assument et revendiquent la rupture avec le passé ». Ibid., p. 143.

[22] LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., p. 197.

[23] Cette idée d’une autonomie de la technique a notamment déjà été annoncée par Jacques Ellul, même si celle-ci revêt, chez lui, un sens bien plus large. Voir notamment sa trilogie consacrée à la technique. ELLUL J., La technique ou l'enjeu du siècle, Paris, Armand Colin, 1954 ; ELLUL J., Le système technicien, Paris, Calmann-Lévy, 1977 ; ELLUL J., Le bluff technologique, Paris, Hachette, 1988.

[24] GIESEN K.-G., « Transhumanisme et génétique humaine », in L‘Observatoire de la génétique, n° 16, mars-avril 2004. [En ligne], http://www.omics-ethics.org/observatoire/cadrages/cadr2004/c_no16_04/c_no16_04_01.html, (consulté le 8 janvier 2016).

[25] LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., p. 196.

[26] À cet égard, on peut souligner ici qu’en France, le mouvement est principalement implanté via l’Association Française Transhumaniste – Technoprog présidée par Marc Roux.

[27] Le Journal of Transhumanism accompagna effectivement la création, en 1998, de la World Transhumanist Association. Cependant, en 2004, la revue change de nom et devient le Journal of Evolution and Technology et est donc désormais publiée par l’Institute for Ethics and Emerging Technologies.

[28] Concernant le profil général des transhumanistes, Klaus-Gerd Giesen observe notamment que « les transhumanistes sont dans leur immense majorité des libertarians anarcho-capitalistes convaincus des seules vertus du marché, et que les œuvres du théoricien néolibéral Friedrich von Hayek figurent sur pratiquement toutes les listes de lectures recommandées ». GIESEN K.-G., « Transhumanisme et génétique humaine », Op. Cit.

[29] SUSSAN R., Les utopies posthumaines. Contre-culture, cyberculture, culture du chaos, Op. cit., pp. 150-151.

[30] Idem, p. 151.

[31] Voir notamment KURZWEIL R., Humanité 2.0. La bible du changement, Paris, M21 Éditions, 2007 (2005).

[32] Utilisé principalement dans le cadre militaire, l’exosquelette est ainsi amené à se développer au sein de la société civile, notamment concernant les personnes handicapées, qui pourraient bénéficier à grande échelle de ces nouvelles technologies, mais également dans de nombreux domaines de la société. On peut citer l’exemple de l’Aéroport de Tokyo-Haneda, qui vient récemment d’équiper les membres du personnel devant porter des charges lourdes. Voir notamment DE LOOPER C., « Next-Generation Robots' Set To Be Introduced Into Japanese Airport », in Tech Time, 3 juillet 2015.

[En ligne], http://www.techtimes.com/articles/65987/20150703/next-generation-robots-set-introduced-japanese-airport.htm, (consulté le 11 janvier 2016).

[33] Ces éléments ne constituent que de simples exemples de progrès technologiques en matière médicale.

[34] LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., p. 209.

[35] BESNIER J.-M., « D’un désir mortifère d’immortalité. À propos du transhumanisme », in Cités, n° 55, 2013/3, pp. 13-14.

[36] Bien que l’immortalité demeure leur horizon symbolique, il convient effectivement de souligner que, d’une manière générale, les transhumanistes souhaitent surtout en finir avec la tyrannie que constituent le vieillissement et la mort.

[37] Voir notamment, à titre d’exemple, ALEXANDRE L., La Mort de la mort. Comment la technomédecine va bouleverser l'humanité, Paris, J.-C. Lattès, 2011.

[38] BESNIER J.-M., « D’un désir mortifère d’immortalité. À propos du transhumanisme », Op. Cit., p. 15.

[39] Sur ce sujet, Nicolas Le Dévédec observe notamment que les transhumanistes se réclament souvent, à tort, de la conception humaniste de la perfectibilité humaine : « La conception de la perfectibilité humaine qui ressort des écrits transhumanistes est au contraire exempte de toute dimension sociale et politique ». DEVEDEC N. Le, La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., p. 210. Il ajoute que : « Loin de parachever la quête humaniste de la perfectibilité, la quête biotechnologique de la perfection portée par les transhumanistes en consacre ainsi plutôt, en définitive, le renversement radical ». Idem, p. 212.

[40] BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 48.

[41] Politologue américain né en 1952 à Chicago, Francis Fukuyama s’est notamment fait connaître grâce à sa célèbre thèse de « la fin de l’histoire », parue initialement sous forme d’article en 1989, puis détaillée dans un ouvrage publié en 1992, traduit sous le titre La fin de l’histoire et le dernier Homme. FUKUYAMA F.,  « La fin de l’histoire ? », in Commentaire, vol. 12,  n° 47, automne 1989, pp. 457-469 et FUKUYAMA F., La fin de l’histoire et le dernier homme, Paris, Flammarion, 1992.

[42] HUXLEY A., Le meilleur des mondes, Paris, Plon, 1933 (1932).

[43] Voir notamment FUKUYAMA F., « La post-humanité est pour demain », in Le Monde des Débats, n° 5, juillet-août 1999, pp. 16-20. Cette analyse se retrouve de manière plus approfondie dans l’ouvrage FUKUYAMA F., La fin de l’homme. Les conséquences de la révolution biotechnique, Paris, La Table Ronde, 2002.

[44] Créé par George W. Bush en 2001, le President’s Council on Bioethics fut dissout en 2009 par Barack Obama.

[45] Nous reprenons ici les quatre étapes évoquées par Fukuyama dans son ouvrage La fin de l’homme.

[46] Idem, p. 117.

[47] FUKUYAMA F., « Transhumanism », in Foreign Policy, n° 144, septembre-octobre 2004, p. 42.

Fukuyama fait ainsi du transhumanisme l’idée « la plus dangereuse du monde », pour reprendre le titre de Foreign Policy.

[48] Voir notamment HABERMAS J., L'avenir de la nature humaine. Vers un eugénisme libéral ?, Paris, Gallimard, 2002.

[49] Voir notamment SANDEL M. J., The Case Against Perfection: Ethics in the Age of Genetic Engineering, Cambridge, MA, Belknap Press of Harvard University Press, 2007.

[50] MCKIBBEN B., Enough: Staying Human in an Engineered World, New York, Henry Holt and Company, 2003.

[51] LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., p. 214.

[52] On peut noter ici que l’un des principaux rapports du conseil demeure celui publié en 2003 sous le titre Beyond Therapy. PRESIDENT’S COUNCIL ON BIOETHICS, Beyond Therapy: Biotechnology and the Pursuit of Happiness, Washington, D. C., 2003.

[53] Voir notamment KASS L., Life, Liberty, and the Defense of Dignity: The Challenge for Bioethics, San Francisco, Encounter Books, 2002.

[54] Pour une présentation plus détaillée de ces auteurs et du bioconservatisme en général, voir notamment LE DEVEDEC N., La société de l’amélioration. La perfectibilité humaine des Lumières au transhumanisme, Op. Cit., pp. 212-224.

[55] HOTTOIS G., Dignité et diversité des hommes, Paris, Vrin, 2009, p. 58.

[56] Voir LECOURT D., Humain, posthumain. La technique et la vie, Paris, Presses Universitaires de France, 2003.

[57] Pour Fukuyama, il ne faut cependant pas tomber dans le fatalisme et arborer une démarche passive. Ainsi, selon lui, « l’idée qu’il est impossible de stopper ou de contrôler le progrès de la technique est tout simplement fausse ». FUKUYAMA F., La fin de l’homme. Les conséquences de la révolution biotechnique, Op. Cit., p. 31. 

[58] BESNIER J.-M., « D’un désir mortifère d’immortalité. À propos du transhumanisme », Op. Cit., pp. 16-17.

[59] ALEXANDRE L., « Transhumanisme versus bioconservateurs », in Les Tribunes de la santé, n° 35, été 2012, p. 76.

[60] Idem, p. 78.

[61] ROBITAILLE A., Le nouvel homme nouveau. Voyage dans les utopies de la posthumanité, Op. Cit., p. 10.

[62] BESNIER J.-M., Demain les posthumains, le futur a-t-il encore besoin de nous ?, Op. Cit., p. 208.

[63] BESNIER J.-M., « D’un désir mortifère d’immortalité. À propos du transhumanisme », Op. Cit., p. 22.

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